La ville et l'appropriation sociale des cultures numériques Eléments d'une politique publique ouverte et en réseau

De Wiki @ Brest

=La ville et l'appropriation sociale des cultures numériques, éléments d'une politique publique ouverte et en réseau= (1)

Michel Briand, élu municipal Brest

Depuis une dizaine d'années la ville de Brest développe une politique publique d'accompagnement des usages de l'internet et du multimédia. Points d'accès public, appel à projet annuel, aide à l'écrit public, co-production de contenus, expression multimédia, chacun des ces axes a le souci de prendre en compte les personnes éloignées culturellement ou socialement de l'internet et du multimédia. Assez loin d'un projet emblématique de « ville numérique », Brest a fait le choix d'un travail en réseau qui cherche à impliquer les acteurs de la cité dans l'accompagnement des usages. Cet article présente quelques champs possibles de l'intervention publique et une démarche coopérative, qui permet un apprentissage en marchant. La diffusion d'une culture numérique ouverte et collaborative interpelle aussi nos fonctionnements marquée par une culture d'organisation hiérarchique et pose la question de l'extension des biens publics vers des biens communs.

1 L'accès public accompagné, point de départ et ancrage territorial

Dix ans après leur mise en place les PAPI "Points d'Accès Public à Internet" restent à Brest un outil essentiel d'une diffusion des usages qui prend en compte les personnes éloignées dans les lieux ordinaires qu'elles fréquentent. (2)

L'intégration d'un accès accompagné dans des lieux ordinaires de proximité

Les PAPI ont été mis en place en 1997 pour permettre un accès aux outils de l'internet à un moment où encore peu de gens étaient connectés. Afin d'impliquer les acteurs au coeur de la vie sociale, nous n'avons pas créé de salles multimédia ou de "cyberbases" spécialement dédiés aux TIC. Nous avons fait le choix de nous appuyer sur des lieux déjà existants : maison pour tous, centres sociaux, patronages laïques, associations en y intégrant un accès public accompagné adapté au lieu. Avec le recul, c'est peut-être le point le plus positif de cete démarche : des dizaines de lieux ont aujourd'hui intégrés internet et le multimédia comme outils et portent maintenant des projets d'écriture multimédia avec les jeunes, de collectes de mémoire ou de reconquête de l'estime de soi.

Un maillage territorial dense qui se renforce au fil des années

La carte des PAPI avec un lieu d'accès public à moins de 400 m nous a permis d'expliquer la démarche et de la rendre visible aux acteurs de la cité. Nous pensions avec 50 à 60 PAPI en 2003 arriver au bout d'un dispositif qui maille la ville en grande proximité. Nous avons eu la surprise de voir les demandes continuer à arriver avec chaque année une dizaine de nouveaux lieux aussi divers que les douches municipales, des FJT et foyers de personnes âgées, des lieux d'expositions.. Cette lente progression traduit le temps long de la diffusion dans la cité : si certains équipements de quartier ont été présents dès le début, d'autres n'arrivent que maintenant selon le contexte, l'histoire de chaque lieu, de chaque projet et la proximité, familiarité des acteurs avec la technique.

Nous avons appris en marchant et en partenariat avec la fédération de laboratoire des usages Marsouin (3) que l'appropriation des techniques multimédia est aussi un moyen de reconquête de l'estime de soi, de valorisation des personnes, de création de lien social et intergénérationnel. Ces dimensions sont aujourd'hui intégrées dans l'appel à projet sur les usages lancé chaque année par la ville de Brest. Par ailleurs, les liens tissés entre l'espace public multimédia de Kérourien (4) et les acteurs du quartier nous ont montré l'importance d'un projet de quartier intégrant le numérique. Cette dynamique nous amène aujourd'hui à concevoir un projet de diffusion d'Internet dans un quartier en articulant trois dimensions:

  • (1)la dimension économique en proposant un accès à bas coût ;
  • (2)le critère social qui pose la mutualisation de l'accès et concerne l'ensemble des familles du quartier ;
  • (3)la dimension personnelle avec la nécessité de mettre en oeuvre un accompagnement dans l'apprentissage des usages, dans la proximité.
Ce projet constitue une autre forme d'accès accompagné à explorer.

Aujourd'hui, avec une centaine de PAPI (5), la ville a accompagné le développement de lieux dont la préoccupation est l'accompagnement des personnes éloignées des habiletés de l'informatique et de l'écrit sur écran. Dans la diversité des projets et des publics ces lieux qui ont en commun une proximité avec les habitants et leur préoccupations quotidiennes partagent cette préoccupation de l'accompagnement des personnes moins habiles avec l'informatique et l'écriture sur écran.

2 L'appel à projets sur les usages : favoriser l'émergence d'initiatives, les donner à voir et développer les liens entre les porteurs de projet.

Sur le modèle de l'appel à projets de la Fondation de France nous avons voulu ouvrir, à notre échelle locale, un espace qui favorise une éclosion d'initiatives dans une démarche d'innovation ascendante. Depuis 7 ans, plus de 200 projets ont vu le jour. Quelques titres donnent un aperçu des initiatives soutenues : Web radio au collège de Saint Pol Roux ; Lutte contre l’illettrisme (Secours populaire) ; Atelier Musique actuelle à Kérourien ;Les ateliers mémoire à l’Office des Retraités de Brest) ; PASAJ : un site internet avec et pour les adolescents et les jeunes adultes ; Cotontige, une radioweb qui créé du lien social et qui valorise la mémoire d’un quartier (6).

Pour mettre en réseau les acteurs nous avons développé une démarche volontariste du "donner à voir" : « si un projet est soutenu par de l'argent public rendons le public » ! S'il est intéressant pour les élus et l'association il peut aussi l'être pour les brestois et d'autres acteurs hors nos murs. Chaque projet est ainsi publié sur le magazine hebdomadaire a-brest.net tout renouvellement de demande l'année suivante est précédé d'un article en ligne dressant le bilan du projet sur l'année.

L'étude réalisée l'an dernier en partenariat avec Marsouin (7) nous a appris qu'au delà du soutien financier modeste (plafonné à 2300 €/an/projet), la mise en réseau des acteurs est essentielle. La multiplication des ateliers d'accompagnement du dispositif, le rapprochement des projets de radios web, de webtrotteurs des quartiers et des lycées, les espaces de rencontres entre acteurs de l'action sociale, de l'insertion et des cultures numériques, entraînent la mise en oeuvre d'une synergie qui donne confiance et permet aux porteurs de projet d'évoluer de la découverte vers une appropriation des usages. Cette évolution se caractérise alors par la qualité des projets multimédia : ceux-ci sont de plus en plus en symbiose avec le projet général de la structure et ne constituent pas de simples outillages mal dimensionnés de projets existants.

3 De l'écrit public à l'expression à travers les outils multimédia

En nous emparant de cette question de l'internet dans la ville nous avons eu le souci d'une démarche publique participative. C'est ainsi que nous avons structuré les premières années d'action publique autour du groupe ouvert « Citoyenneté et nouvelles Technologies » (CNT) (8) à savoir un lieu d'échange et d'élaboration des premières initiatives. Dès le départ nous avons fait le choix d'une mise en ligne des compte rendus de réunions, des listes des participants et des initiatives. Mais à l'époque, (1997), il fallait des habiletés particulières pour écrire en utilisant le langage "html" ce qui limitait, en toute logique, l'écriture à quelques personnes ayant ces connaissances et les droits pour le faire (l'époque des webmasters : littéralement les maîtres du web).

L'apparition au début des années 2000 des systèmes de publication de contenus (ou CMS selon l'acronyme anglais) en séparant l'édition du texte, des technologies de publication sur le web a permis un véritable changement qualitatif. Pouvoir publier un article en posant du texte dans des formulaires avec des champs "titre" "brève" ou "texte de l'article" a ouvert un véritable changement culturel de nos pratiques. La publication sur le web devenait une activité d'écriture à la portée de tout un chacun comme allait le montrer rapidement l'essor fantastique des blogs parmi les jeunes, natifs du numériques. D'un côté, le site est devenu un magazine de publication "www.a-brest.net" ouvert à l'écriture des acteurs locaux (ou d'ailleurs). Petit à petit, les personnes du service ont pris l'habitude de publier, les initiatives, les bilans, et les compte-rendus, et de rediffuser l'information qui nous était adressée. Aujourd'hui, les 5 000 articles et brèves publiées sur le site, les 1 200 abonnés à la lettre hebdomadaire, les 10 000 visiteurs uniques par semaine rendent compte de la richesse de cette pratique. Mais pour autant ce changement culturel long en soi diffuse très lentement autour de lui. A ce jour, seuls 4 autres sites participatifs ont été créés et sont animés par la collectivité et ce dans des services qui ont adopté par ailleurs des démarches de type participatif (9).

D'un autre côté, la mise en place d'une action publique en faveur de l'expression démocratique, appelée « écrit publics » ()a largement bénéficié du développement de la plate-forme de publication SPIP (11).. Durant les années 2003-2005, des dizaines d'ateliers, (jusqu'à un par semaine en 2003 par 2005) d'initiation à l'utilisation de l'outil, mais plus encore d'initiation à l'écrit et à l'expression journalistiques ont permis l'éclosion de plus d'une centaines de sites associatifs hébergés majoritairement par l'association Infini, pivot de cette diffusion. (12)

Le projet webtrotteurs des lycées 13, animée par une quinzaine d'enseignants et qui implique chaque année deux cent lycéens de la cité scolaire de Kérichen (deux lycées professionnels et un lycée général), rend compte de l'évolution rapide de l'écrit dans l'espace public vers l'écriture multimédia. La participation de lycéens à des manifestations comme le festival européen du film court, le festival longueur d'ondes, les entretiens scientifiques, sert de cadre pour un apprentissage qui mêle les techniques d'interviews, l'ouverture à une démarche culturelle et scientifique et les usages d'internet et du multimédia.. Après des premières années centrées autour de l'écrit et de la photographie, les porteurs du projet ont introduit le son puis la vidéo tout en construisant au fur et à mesure leur propres outils.

Aujourd'hui le médiablog coopératif issu de ce projet est une plate forme de publication qui a accueilli, en un an d'existence, plus d'une quarantaine de canaux pour des webradios de collèges, des vidéos de quartier des actions associatives aussi innovantes que la mise en ligne de vidéo par l'amicale des donneurs de sang. Cela traduit un intérêt certains des jeunes et des moins jeunes, pour ce mode d'activité dans les loisirs de quartier, les projets éducatifs ou associatifs.

4 Vers la co-production de contenus

Le travail en réseau, la mise en commun des initiatives et le partage des expériences a donné lieu à de l'innovation ascendante dans les usages mais a aussi motivé le besoin de construire ensemble les outils adaptés à nos projets.

Dans cette dynamique, le CD bureau-libre Free-Eos (14) a été élaboré au cours de 3 réunions par quelques dizaines d'associatifs. Il a permis de populariser les logiciels libres à travers les outils basiques que l'on trouve sur n'importe quel bureau d'ordinateur. Le CD a été diffusé à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires au pays de Brest et plus de 200 000 en France. Ce projet qui s'est usé dans la mise à jour des versions annuelles laisse la place pour la rentrée au projet "libre-a-brest". Celui-ci vise la mise en place d'une diffusion accompagnée de logiciel libre (distribution Linux) dans la ville.

De même, la photothèque collaborative "un zef d'images" (15) espace en ligne de partages de photos au pays de Brest, a donné naissance au projet des wiki-balades : "Territoires sonores" collecte des sons, les relie à des parcours et propose des wiki-balades à Morgat et au Cap de la Chèvre.

La mise en réseau des acteurs constitue ici un terreau fertile d'innovations d'usages d'où naissent de nouveaux projets co-construits tels que le projet wiki-brest.

5 Wiki-brest les carnets d'écriture collaborative au pays de Brest

À l'instar de l'apport de SPIP dans la possibilité de publier en ligne sans connaissance informatique, la rencontre de la démarche encyclopédique de wikipedia et de l'outil médiawiki a ouvert un monde des possibles dans l'écriture collaborative où la contribution peut se faire sur un mot, une phrase d'un écrit déjà existant ou dans la création d'un nouvel article. Et l'expérience nous montre que le pas à franchir est plus petit même si l'idée d'une écriture ouverte et publique sans contrôle en amont est encore plus éloignée de nos pratiques organisationnelles de production d'écrit.

Autour de l'accès public accompagné nous avons mis en place un centre de ressources de l'accès public à Internet (16) qui associe le dispositif brestois des papis et les cybercommunes (initiées par le conseil régional) sur le pays de Brest dans une démarche coopérative où les acteurs sont tour à tour formateurs ou apprenants selon leur compétences.

Le pays de Brest regroupant 7 communautés de communes (89 communes) est un territoire où vivent et travaillent 360 000 habitants autour de Brest (bassin de vie et d'emploi). Alors que, Brest ville militaire a été coupée pendant des siècles de son environnement rural, les évolutions des villes ont amené à mêler les populations urbaines et rurales et à donner l'agglomération un rôle de métropole régionale. Au croisement d'un projet de territoire et d'une envie d'écriture collaborative sur le patrimoine communautaire (culturel, social, historique et géographique) et le vivre ensemble nous avons initié Wiki-Brest.

Parti d'une page vide il y a deux ans, Wiki-Brest compte aujourd'hui 700 contributeurs, 1 500 articles, 120 000 visites et 100 nouveaux articles par mois. Ici, plus que dans tout autre projet, nous apprenons en marchant. Au bout d'un an d'existence, nous avons commencé à structurer le site, après avoir collecté suffisamment d'articles pour définir les rubriques pertinentes. Avec les « wiki-journées » de collecte, les les « wiki-contoirs » au cours desquels les auteurs présentent leurs écrits, les portails thématiques qui constituent des espaces d'expression pour les journaux de quartiers, les jardins partagés, la place des femme, les 8 marines Brestoises, Wiki-Brest se construit au fur et à mesure des apports de ces contributeurs, intégrant à son tour l'écriture multimédia. En outre cette écriture collaborative se diffuse lentement à travers l'usage des wikis pour préparer un projet, organiser une rencontre écrire un album, un guide .. (17)

Nous terminerons cette présentation de la politique publique brestoise en matière de de diffusion et d'usage d'Internet et des outils du multimédia par deux questions transverses, la prise en compte des publics éloignées et la coopération et les biens communs.

6 La prise en compte des personnes éloignées

Dans le projet présenté à la municipalité, la question de l'équité d'accès et de la prise en compte des personnes éloignées a été un élément moteur dans le lancement des PAPI. Au fur et à mesure de notre apprentissage, l'accessibilité s'est élargie dans une dimension de lien social, de reconnaissance des personnes et du vivre ensemble. Aujourd'hui la moitié des projets soutenus relèvent de la politique de la ville et concernent des personnes isolées socialement ou en situation de précarité, c'est aussi le cas de la moitié des PAPI qui s'ouvrent chaque année. Dans ce panorama, il est difficile d'en faire le tour et je choisirai deux illustrations. ===Le projet Intergénér@tion === (18) Ce projet porté par Monique Argoualc'h, animatrice du dispositif relais, met en relation des jeunes collégiens placés en dehors du contexte scolaire et des personnes très âgées. Ici les jeunes qui étaient en "échec scolaire" deviennent professeurs en apprenant aux résidents d'une maison de retraite à découvrir internet (projet 2004), à publier des petits articles (2005), à collecter des histoires de vie et des fragments de mémoire sur Wiki-Brest (2006) ou à écrire sur un blog autour du langage SMS, (2007). Alors qu'ils avaient des difficultés à s'adapter au système scolaire classique et à assister à un cours, ils deviennent patients dans l'accompagnement des personnes âgées malhabiles avec l'ordinateur. Voici une belle expérience de liens qui se tissent antre des personnes à priori culturellement éloignées. Chaque année un DVD retrace en image cette transformation qui s'opère dans ces relations intergénérationnelles ou internet où internet n'est que le support d'une reconquête de l'estime de soi, aussi bien chez les jeunes que chez les anciens ! Le projet, portée par une animatrice en attention aux jeunes, sans compétence initiale en matière de techniques du multimédia, est réalisé en partenariat avec l'animatrice de l'association Infini et se renouvelle chaque année' au fur et à mesure de la diffusion des usages, des envies et des nouveaux outils.

Internet de quartier

Pour prendre en compte l’écart croissant entre ceux qui utilisent les outils de l’internet et ceux qui en sont éloignés, la ville de Brest, le D.S.U., et l’office HLM vont créer en 2001, sur Kérourien, quartier prioritaire de la politique de la ville, un espace multimédia localisé dans un logement social au cœur du quartier. Le travail d’observation participante réalisé par le GIS Marsouin, en 2005, a notamment mis en évidence que :

  • L’accompagnement des personnes est déterminant. Pour faciliter l’entrée d’un habitant dans un processus d’apprentissage, il a besoin d’être entouré, accompagné. Dans ce lieu ouvert sur le quartier, le rôle de l’animation et la dimension humaine qui y est accordée sont donc essentiels.
  • L’accompagnement favorise la création d’usages multimédia par les habitants. Il ne s’agit plus seulement « d’équipements pour réduire les écarts » mais d’une palette d’usages inventés par un ensemble d’habitants et d’acteurs du quartier dès lors que l’animatrice a su développer une attitude d’attention aux personnes et aux usages potentiels. C’est ainsi que le projet d’espace public numérique se transforme en projet Internet de quartier.

La maîtrise des outils permet aux personnes fragilisées une reconquête de l’estime de soi. Le moindre progrès dans les usages multimédia agit sur les représentations que les usagers ont d’eux-mêmes. C’est à partir de ces constats, et de la dimension structurante de l’espace multimédia, qu’est né le projet Internet de Quartier qui fédère des habitants, des associations, des institutions. Les projets d’usages, les initiatives originales foisonnent aujourd’hui19 sur Kérourien et c’est dans ce contexte, que le projet « Internet pour chacun-e en Habitat social » s’inscrit comme une nouvelle étape du processus d’e-inclusion sur la ville.

7 Coopération et question des biens publics comme bien communs

Avec une dizaine d'années de recul, c'est autour de la coopération, de la mise en communs que nous trouvons un fil conducteur à toutes nos actions.

C'est une démarche participative mise en oeuvre localement qui traduit une attention aux projets et une démarche volontariste de mise en réseaux. Aujourd'hui les différentes dimensions présentées interagissent : Les PAPI sont des lieux d'accueil pour créer un site et apprendre à publier, s'informer sur le logiciel libre et l'utiliser, écrire sur wiki-brest ... un logo signale dans la page de chaque PAPI les accompagnements proposés dans ce lieu. Nous faisons évoluer l'appel à projet en intégrant chaque année de nouvelles dimensions :l'écrit public, puis la reconquête de l'estime de soi, l'expression multimédia, les collectes de mémoire. Nous avons dans l'idée de lancer un projet de web social territorial ("donner c'est pas jeter") qui rendra plus visible ce croisement des lieux et des projets.

A chaque étape, notre expérience s'est enrichie du croisement de réseaux d'acteur-ice-s de l'accès publics (CreAtif) des observatoires d'usages et de l'innovation (OTV, AVICCA, FING, Marsouin) et de l'implication citoyenne (Vecam, I3C). Le travail de ces réseaux autour du logiciel libre et des biens communs, leurs pratiques coopératives, la publication de contenus réutilisables, reflètent cet essaimage du logiciel libre et de la la mise en biens communs. Le prochain Forum des usages coopératifs 2008, organisé cette année autour du thème "Habitons nos territoires" permettra une rencontre avec les autres réseaux d'acteurs francophones ayant en souci cette démarche de coopération avec l'espoir d'y voir naître de nouvelles collaborations. La volonté de "donner à voir" et de mettre en communs expériences et actions nous a amené à nous poser les questions des biens publics trop rarement mis en biens communs. Aujourd'hui les productions intellectuelles sont souvent numérisées et leur reproduction, leur diffusion a un coût quasi nul. Quel sens donnons-nous à l'interdiction de diffusion a priori, liée au droit d'auteur lorsqu'il s'agit de productions utiles à d'autres et financées par l'argent public ? Pourquoi, alors que des licences comme les Creative Commons permettent d'élargir les droits de ré-utilisation est-il, en général, interdit en France de copier, de réutiliser, de mettre en "communs" ce qui est produit par les acteurs du service public ?

Plusieurs raisons se mêlent : la méconnaissance de cette question des droits, la peur du porteur de projet de voir son idée "copiée", le "pouvoir" de détenir seul ou à quelques uns l'information ... Pour comprendre les freins et motivations à ces mises en communs une recherche "Bicoop" est initiée au sein de l'Institut Télécom avec plusieurs partenaires universitaires. Et en parallèle au sein d'un groupe de travail d'"Intercoop",20 nous avons ébauché un plan de travail avec une foire aux questions, une collectes d'expériences, des articles, interviews, un schéma de publications libres, des ressources pour accompagner les acteurs des services publics.

Toutes ces initiatives n'auraient pu voir le jour sans l'implication des acteurs locaux, le travail en réseau francophone et l'animation par les 7 personnes du service démocratie locale et citoyenneté d'une politique publique ouverte. La ville de Brest et l'élu en charge ont affirmé des principes d'équité, de solidarité, d'autonomie qui s'appuient sur les initiatives et les accompagnent. Mais, c'est avec les acteurs de l'insertion que nous avons appris l'importance de la reconnaissance et de la reconquête de l'estime de soi, avec les études de Marsouin, nous avons mis des mots sur les paliers d'apprentissage, avec Archipel du libre et Free Eos, nous avons appris à fabriquer le CD ou à créer une photothèque coopérative, avec les webtrotteurs que nous avons inventé le Médiablog, avec les acteurs de Wikimédia France et les collectes dans la cité, nous avons construit wiki-brest.

Et c'est ensemble que nous avons (élu, service, associations, "réseaux communautaires") appris le travail collaboratif et la mise en biens communs de nos productions informationnelles.

Michel Briand, (21) élu de la ville de Brest en charge de l'internet et de l'expression multimédia


Quelques références  :

  • « Libre et coopération, accès public, écrit public et co-production de contenus accompagnés » Colloque du CLLAP, Québec mai 2006, http://www.cllap.qc.ca/2006/
  • « Le changement de culture de l’écrit public » contribution au dossier de la revue Transversales Science Culture « Cyberespace et citoyenneté », mai 2006.
  • « Expression citoyenne » dans Enjeux de mots : regards multiculturels sur les sociétés de l’information ; livre, coordonné par Alain Ambrosi, Valérie Peugeot et Daniel Pimienta publié et diffusé au SMSI, le 5 novembre 2005 par C & F Éditions.
  • Les colloques organisés en Bretagne  : Forum des usages coopératifs (2004, 2006, 2008), Ecrits écrans publics (2006, 2007) , Etés TIC de Bretagne (2007), I4C (2002), Rencontres du net Public (2005-2007), Conférences des villes de Bretagne et TIC (2001-2003).
  • Animation de réseaux sur l'appropriation sociale d'internet : la page de l'auteur sur a-brest : http://www.a-brest.net/auteur2.html
  • Les écrits et présentations du service dans l'agenda public : http://www.reunionsabrest.infini.fr/index.php/Accueil#Textes

notes

  • (1)Un texte qui s'articule autour de la politique publique d'appropriation sociale d'internet et du multimédia mise

en ouvre par le service démocratie locale et citoyenneté de la ville de Brest (1997-2008)

  • (2) Malgré un désengagement financier de l'état et une politique laissée aux bons vouloir des collectivités locales,

l'accès public accompagné, reste un enjeu fort pour éviter que de nouvelles exclusions numériques se surajoutent à l'isolement social de l'âge ou du handicap. Voir à ce sujet le travail de l'association Créatif : Créatif : Collectif des Réseaux d’Accès aux Technologies de l’Information en France : http://www.creatifpublic. net et les préconisations de l'association.

  • (3) L’espace multimédia de Kérourien a fait l’objet d’une étude dans le cadre de l’appel à projet du Ministère de

la recherche : Psaume « Populations Socialement défavorisées et TIC : Analyse des (non-)Usages, des Médiations et des Expériences.« : http://www.psaume.infini.fr/rubrique.php3?id_rubrique=5 Nous avons travaillé en collaboration avec le projet Internet de rue d'ATD Quart monde (http://www.internetderue.net/) avcec des rencontres des médiateurs de l'accés public.

  • (4) Voir d’Internet de quartier à Internet pour chacun-e à Kerourien

avant projet d’un accès accompagné à bas coût en habitat social : http://www.a-brest.net/article3986.html

  • (5) Pour les 10 ans des papis la ville prépare un album des papis, initié par une écriture collaborative sur wikibrest
http://www.wiki-brest.net/index.php/PAPIs_de_Brest
  • (6) Les projets sont présentés dans la rubrique appel à projets : http://www.a-brest.net/rubrique63.html
  • (7) L'ensemble des actions menées fait l'objet régulièrement d'évaluations qui permettent d'établir un bilan et

aident à orienter l'action de la ville par la compréhension apportée. Une conventionné a été passé avce le laboratoire des usages Marsouin (http://www.marsouin.org/) qui regroupe des chercheurs des 4 universités de Bretagne et de TELECOM Bretagne. pour pérenniser cette démarche. Voir ici le bilan de l'appel à projet : http://www.a-brest.net/article3738.html

rend compte des axes initiaux : l'accés public, les associations, l'éducation,, l'accès aux droits et à l'emploi, la mise en réseau des animateurs TIC.

  • (9) Les sites : participation-brest.net sur les conseils de quartier, pel-brest.net sur le projet éducatif local,

forumsantebrest.net sur les initiatives autour de la santé et Eco-sol-brest-net sur l'économie sociale et solidaire.

usages coopératifs en juillet 2004 : http://www.a-brest.net/rubrique82.html. Mais nous avions sous-estimé le d'échos ailleurs tout comme l'initiative"conseils de quartier" d'une écriture francophone ouverte autour des conseils de quartier : http://www.conseils-quartiers.net/

  • (11) Un logiciel libre http://www.spip.net largement utilisé en France pour la publication de contenus.
  • (12) Voir par exemple la ronde des 64 sites de publication coopératifs établie en 2004 :http://www.abrest.

net/article5.html et les 174 sites hébergés : http://www.infini.fr/spip.php?rubrique13. L'utilisation d'un même environnement de développement en logiciel libre (SPIP : http://www.spip.net/ et aujourd'hui media wiki (http://www.mediawiki.org/wiki/MediaWiki/fr) a facilité le travail en réseau avec l'organisation régulière de spip apéros.. en attendant les wikis-apéros !

et les webreporters des quartiers animés part la Ligue de l'enseignement : http://www.webreportage.infini.fr/ Le médiablog coopératif est une plate forme de publication adaptée pour la vidéo réalisée en logiciel libre : http://mediablog-brest.net/

et la rubrique qui retrace la vie du projet par les articles publiés : http://www.a-brest.net/rubrique121.html

aujourd'hui plus de 700 photos de paysages au pays de Brest sous une licence (Creative commmons) qui élargit les droits de réutilisation : http://www.1zef2images.org/spip/ Le projet Territoires sonores, en plus des wiki-balades propose des Guides des baladocréateurs sonores : http://www.maison-des-mineraux.org/territoires-sonores/

et le bilan du projet soutenu par la région et le département : http://www.a-brest.net/article2355.html

  • (17) Il y a aujourd'hui un wiki autour de chacun de nos projets et l'assnceur des "wikis à Brest " e bas à droite de la

page d'accueil d'a-brest.net rend compte de cette diversité d'usage

sur le médiablog : http://www.mediablog-brest.net/dispositifrelaiskerbonne/ sur a-brest voir la rubrique appel à projet de chaque année : http://www.a-brest.net/rubrique63.html

net/article2811.html

    • L’informatique au service de l’accompagnement scolaire / collectif de partenaires engagés dans

l’accompagnement scolaire sur le quartier de Kerourien : http://www.a-brest.net/article1786.html

    • Projet d’aide à l’apprentissage du code de la route sur les quartiers de Kérourien/ Kéranroux : http://

www.a-brest.net/article1795.html

Intercoop : interconnexion de réseaux coopératifs : http://www.intercoop.info/index.php/Des_biens_publics_aux_biens_communs

  • (21) et merci à Elisabeth Le Faucheur et Annabelle Boutet pour leurs apports à cette écriture.